Elefant-zine #9 - La grande Sophie-stickée

Un jeudi soir de juin 2009 en banlieue rouennaise,

Ma chère Wanda,

Hier, j'ai revu cette chanteuse dont je t'ai déjà parlé à maintes reprises sur le chemin du cimetière: LA GRANDE SOPHIE.

Elle est venue présenter son 5ème album "des vagues et des ruisseaux" non loin de l'endroit où tu aimais venir boire un verre.
Son nouvel album est comme nous: il a muri. Il est souvent triste, sincère, incertain. Il a 40 ans déjà!...Comme toi, comme elle et comme moi...
Certes, On sent un peu moins la fraicheur, la fougue et l'énergie  des albums précedents  mais la vibration mélo qu'elle sait si bien distiller est toujours présente comme sur son putain de single "quelqu'un d'autre" qui me glace sur place. Il est construit sur la progression d'accord mélancolique de "Ode to my family" des Cranberries en D-Bm-Fm-G que tu aimais tant.
écoute ce qu'elle dit:

......

Renaître, connaître autre chose
Demain si tout explose
On voudrait tous être
Quelqu'un d'autre
Mais est-ce que ça suffit
Pour oublier des moments
Quelqu'un d'autre
Changer de peau, de décor
Quelqu'un d'autre
Et se sentir ailleurs
Un autre costume
Une autre voie
D'autres coutumes
Faire d'autres choix
Se réveiller dans une autre peau
Et voir la vie sous un ciel nouveau
Le ciel de...Quelqu'un d'autre.

Toi seule sait le pouvoir de ces mots, n'est ce pas ?  Les autres morceaux de l'album m'apparaissent un peu plus classique (surtout dans les arrangements). Ils se matinent ici et là de variété francaise et sont à mon avis moins indélibiles que ses précedents opus. Beaucoup de ses thèmes parlent de sa rupture amoureuse. "Ce jour là", "pardonner", "ta mauvaise foi", "des vagues et des ruisseaux" en sont autant de témoignages éloquents. C'est souvent grave, émouvant, écrit dans un style folk qui crée une intense proximité. Ceux-là sont encadrés par la reprise de Barbara "Dis quand reviendras-tu?" qui ne m'a pas convaincu et un bon vieux morceau recyclé de la tournée "la suite" de 2005 nommé "Dans le show bizness" mais que tout le monde appelle: "tou, tou, tou, tou, tou" au rythme de la mélopée chantonnée comme seule Sophie sait la faire. C'est un brûlot pop en 3 accords majeurs dégré 1-4-5 (typique Pop) trop facile pour certains avec des rimes tout aussi faciles pour d'autres mais qui fait mouche à tout les coups et qui me rappelle avec émotion son zenith avec les majorettes sur scène.
C'est vrai, il commence à être loin ce Zenith parisien. loin aussi le temps du "porte bonheur", de "martin" qu'elle joue d'ailleurs toujours aussi bien sur scène. Aussi loin, le temps de "et si c'était moi"et de son single "Du courage" qu'elle reprend dans une version accoustique bien trop triste pour moi qui aime la guitare saturée de la version originale. "La suite, le milieu , la fin" a subi le même sort: exit le gros son, la bonne grosse basse et l'envie de pogoter.
Sophie m'est apparue moins sophistiquée, moins rock (pour peu qu'elle l'est été). Elle vise la simplicité, la sincerité mélodique.
Sophie est avant tout une artiste de scène, qu'on se le dise. Entouré d'un groupe rock guitare-basse-batterie-furie en 2005 et maintenant d'un groupe réduit à la contrebasse, batterie jazz et synthé, elle assure toujours le show et elle est toujours (il faut l'avouer) aussi belle... Comme toi... Elle a un peu tes cheveux d'ailleurs. Comme toi et comme ses chansons gravés sur le fil du temps.
Sophie sera toujours celle qui a écrit "le passage obligé", "on savait", "des roses rouges", "même pas" et le récent "quelqu'un d'autre". Autant d'incontournables qui la rendent immortelle.  Une autre fois encore, peut être, elle les chantera...Une autre fois encore, peut être, je t'en reparlerai...
Rien ne manquait ce soir, sauf mes cheveux sur mon crâne chauve...et toi...Comme toujours.

A la mémoire de Wanda P. Repose en paix 1969-1991